Trois questions à Anessa Kimball

4 octobre 2018

Sur la politisation de la Cour suprême américaine

Jamais encore la nomination d’un juge à la Cour suprême américaine n’a autant passionné l’opinion publique. L’opinion se polarise autour de Christine Blasey Ford et de Brett Kavanaugh, le candidat au poste de juge qu’elle accuse d’agression durant son adolescence. Cet intérêt démontre aussi que cette institution n’échappe pas à la politisation actuelle de la société américaine, comme le constate Anessa Kimball, professeure au Département de science politique.

Pourquoi l’élection de ce juge à la Cour suprême a-t-elle pris une telle importance dans l’opinion publique ?

Cela s’explique en partie par la conjoncture. Le candidat Kavanaugh prendrait la place d’Anthony Kennedy, qu’on appelle le juge-pivot, car, tout en étant conservateur, il votait parfois avec les libéraux. Ainsi, il a appuyé la protection des droits des homosexuels et du mariage pour les personnes de même sexe, mais s’est aussi prononcé pour la garantie de l’accès aux armes avec les conservateurs. Or, le candidat Kavanaugh a une position très différente du juge qu’il remplacerait. Lui-même se définit comme très conservateur. Comme il s’agit d’un mandat à vie et qu’il n’a que 55 ans, il est très probable que sa nomination ait des effets dans plusieurs années, d’autant plus que plusieurs juges libéraux vont prendre leur retraite d’ici 5 ans. En résumé, la Cour suprême pourrait donc devenir beaucoup plus conservatrice dans l’avenir. Des procureurs seront alors peut-être tentés de soumettre des cas remettant en cause le droit des femmes à l’avortement. Certaines lois progressistes sur l’égalité des personnes, la protection des homosexuels et la protection des minorités pourraient donc reculer.

Article complet, Le fil, 2 octobre 2018