14 novembre 2019

Heure: 12:00 à 13:00
Lieu: Local FAS-0091, pavillon Félix-Antoine-Savard

Description de l'événement

PERCEVOIR LA FORET OU LES ARBRES: IMPACT DE L'EXPOSITION URBAINE SUR LE BIAIS PERCEPTUEL.

On imagine souvent que la perception humaine est déterminée avant tout par l’architecture biologique du cerveau humain, et qu’elle est identique à travers lieux et cultures. Ainsi, on a longtemps pensé qu’à l’âge adulte tous les êtres humains présentent un biais perceptuel global, percevant la forêt (la forme globale) avant de percevoir les arbres (les formes locales qui composent la forme globale ; Navon, 1977). Pourtant, des résultats récents montrent que ce biais varie d’une culture à l’autre, et remettent en cause son universalité. D’une part, le biais global est plus marqué dans les cultures asiatiques que dans les cultures occidentales, et d’autre part, les Himba, une culture traditionnelle vivant dans le nord de la Namibie, perçoivent les formes locales avant de percevoir la forme globale.

Les origines de ces différences interculturelles restent matière à débat. Un modèle intuitivement attrayant les attribue à des différences d’organisation sociale (Nisbett et al., 2001) : les sociétés asiatiques collectivistes promouvraient une cognition holistique et globale, comparées aux sociétés occidentales individualistes qui promouvraient une cognition analytique et locale. Cependant, ce modèle ne permet pas d’expliquer la perception des Himba, qui malgré leur société collectiviste présentent un biais local. Nos données récentes collectées dans plusieurs pays (Namibie, Rwanda, France, Royaume-Uni), chez des adultes mais aussi des enfants de 5 à 15 ans, appuient un modèle alternatif. Elles montrent un lien étroit entre exposition urbaine et biais perceptuel. Une exposition même brève et occasionnelle aux environnements urbains promeut un biais perceptuel plus global. Ces données suggèrent que l’impact des milieux de vie sur le biais perceptuel est médié par un processus attentionnel. Nos données confirment la plasticité des processus perceptifs et attentionnels et leur forte sensibilité à notre environnement.

Serge Caparos, PhD, est Maître de conférences à l'Université Paris 8 et membre de l'Institut Universitaire de France.