Soutenance de thèse de Simon Chaunu

Heure: 9h
Lieu: Pavillon Charles-De Koninck, local 3470 et sur Zoom
Description de l'événement
Soutenance de thèse de Simon Chaunu
« Vita industria: une socio-histoire des origines intellectuelles de l'écologie politique »
Lien de la réunion Zoom: https://ulaval.zoom.us/j/68994018749?pwd=YjY5eXo5aHVJMHFmN05LbXhWcm1hdz09
ID de réunion: 689 9401 8749
Code secret: 060316
Résumé: Cette thèse propose d’explorer un courant d’idée informel et marginal du XXe siècle, qui peut se caractériser comme une écologie politique révolutionnaire, se fondant sur une critique radicale de la civilisation industrielle et de son facteur principal, la technique moderne. Le but de cette étude est d’en évaluer la cohérence et la pertinence, en se concentrant sur les œuvres de quatre intellectuels rattachables à ce courant : l’urbaniste américain Lewis Mumford (1895-1990), le philosophe allemand Günther Anders (1902-1992), le sociologue français Jacques Ellul (1912-1994) et l’historien nomade Ivan Illich (1926-2002).
Dans un premier temps, ce travail présente la méthode qui a guidé l’étude de ces textes: une socio-histoire des idées qui emprunte tout autant à la discipline historique qu’à la discipline sociologique. Les enjeux de l’étude des pensées environnementalistes et écologistes sont également exposés, afin de souligner les spécificités de cet objet de recherche. Ce qui amène à la formulation de la problématique de cette thèse: ce courant d’idées écologiste peut-il être défini comme un langage, au sens que l’histoire des idées politiques donne à ce concept? La principale assertion de cette étude est qu’il doit plutôt être compris comme une matrice intellectuelle, un ensemble cohérent de leitmotivs visant la connaissance social-historique, et pouvant servir de base à des langages davantage tournés vers l’action politique. Ce qui contraste avec les polémiques romantiques contre le machinisme au XIXe siècle, qui exprimaient une sensibilité anti-industrielle plus diffuse.
Par la suite, les cinq principaux chapitres de cette étude fournissent un contre-récit du XXe siècle, à travers la lecture profonde des textes des auteurs retenus. Ce récit débute avec l’examen des ouvrages pionniers de Lewis Mumford durant l’entre-deux-guerres, notamment son étude de ce qu’il nommait « l’Âge de la Machine ». Après la Seconde guerre mondiale et les bombardements nucléaires d’Hiroshima et de Nagasaki, Günther Anders et Jacques Ellul élaborèrent, de manière convergente, un diagnostic critique de la société technicienne et conformiste de l’après-guerre. Ces trois intellectuels réitérèrent leurs analyses dans les années 1960 et 1970, alors que l’Occident était marqué par une vague multiforme de contestations et de révoltes. Prenant leurs distances face à ces mouvements, ils estimaient qu’en réalité un système mégatechnique venait de triompher. Ivan Illich fit sienne cette critique de la démesure et de la déraison technologiques, en l’étendant aux secteur de service, puis il traça les grandes lignes de ce que pourrait être une société conviviale. Cependant, le mouvement écologiste contemporain échoua à intégrer ces idées, et manqua sa révolution.
La matrice intellectuelle de cette écologie politique révolutionnaire reste active de nos jours, à travers les langages du néo-luddisme, de l’écosocialisme et de la décroissance. Des recherches futures sont nécessaires pour bien saisir cette filiation, et pour rattacher d’autres auteurs à cette matrice d’idées.