Le Laboratoire de recherche sociologique offre aux étudiant.es en 2e et 3e année au baccalauréat en sociologie à l’Université Laval une occasion de se frotter à la recherche. Durant un an, ils et elles produisent une étude de A à Z pour un organisme commanditaire. C’est un cours dense, exigeant et professionnalisant, qui démarque la formation de premier cycle du Département de sociologie de l'Université Laval. Des étudiant.es l’ayant suivi, au cours de l’année universitaire 2019-2020, font le bilan de cette expérience et donnent des conseils à celles et ceux qui souhaiteraient se lancer. 

Vicky Arseneault, Accessibilité et représentations des vacances : un portrait comparatif entre les individus retirant un faible revenu de leur(s) activité(s) de travail et ceux ayant recours à l’assistance sociale

« Le fameux laboratoire de recherche, celui qui insinue la peur dans les yeux des étudiantes et étudiants en première année et fait fermer les yeux de celles et ceux qui y sont passés. Si je devais faire le bilan de mon expérience au laboratoire, je la comparerais à une triple dose d’espresso ; sombre, intense et difficile, mais ô combien stimulante et efficace ! Le laboratoire c’est le chemin de Compostelle de la recherche. Du début à la fin on se demande si on va être en mesure de se rendre jusqu’à la fin, mais à la ligne d’arrivée on se retrouve avec une expérience concrète – et reconnue sur le marché du travail – qui nous permet d’avoir une bonne représentation de tous les aspects du travail de recherche. Cela dit, si je devais donner un conseil de vétérante, ce serait de l’aborder avec bienveillance. Si on souhaite toutes et tous réaliser une grande recherche avec un vaste échantillon, il faut se rappeler que les conditions de réalisation du laboratoire ne sont pas représentatives des conditions réelles de recherche. Personne ne doit faire un projet d’envergure en moins d’un an, sans financement, en conciliant des cours universitaires, un travail et leur vie personnelle. Il faut prendre le laboratoire comme une expérience d’apprentissage unique et se souvenir que parfois la leçon c’est de savoir quels pièges éviter dans nos futures recherches. »

 

Maxime Desfossées, Accessibilité et représentations des vacances : un portrait comparatif entre les individus retirant un faible revenu de leur(s) activité(s) de travail et ceux ayant recours à l’assistance sociale

« Après avoir fait le Laboratoire de recherche, je me lance dans l’imminente rédaction d’un mémoire de maîtrise avec moins d’incertitude et une appréhension moindre du terrain. Le Laboratoire a donc su me donner une longueur d’avance, dans la mesure où il a pu me donner une expérience sociologique de terrain, qui ne se trouve pas ailleurs dans le cursus du baccalauréat en sociologie. Néanmoins, il faut être avisé.e que le Laboratoire est très demandant, à se demander si 12 crédits rendent justice à la lourdeur de la tâche y étant associé. Si j’avais à donner des conseils à quelqu’un voulant se lancer dans cette aventure, ce serait d’être bien averti.e qu’il s’agit d’une expérience prenante, mais qui est avantageuse dans un baccalauréat plutôt théorique. Malgré l’aide fournie, il faut quand même avoir une certaine autonomie, puisque la plupart des choix reviennent à la personne qui entreprend la recherche. »

 

Nicolas Fournier-Boisvert*, L’exclusion sociale vécue par les personnes en situation de pauvreté : Étude de cas des personnes qui sont usagères des services offerts par des organismes communautaires du quartier Saint-Roch à Québec

 « Le Laboratoire de recherche est une belle activité de formation à la pratique sociologique. Les étudiant.e.s sont amené.es à mettre la main à la pâte et à essayer des choses pour mener à terme un projet. Histoire de garder une bonne santé mentale, si je devais donner un seul conseil aux futur.es étudiant.es, je leur proposerais de tisser rapidement des liens avec le reste du groupe et de garder du temps pour vous rassembler à l’extérieur du cadre scolaire. Pensez aussi à votre santé mentale, à prendre du temps pour vous et vos proches. Bien que très formateur, le Laboratoire est une expérience souffrante et difficile, où les joies suivent les périodes de découragement. »

 

Chenour Oechslin, L’expérience de l’accompagnement personnalisé au regard du parcours migratoire

« Je peux dire que j’ai énormément appris au sujet des étapes de la réalisation d’une recherche. J’ai été sensibilisée à la place et l’importance de la réflexivité dans toutes les étapes de la recherche. J’ai aussi beaucoup apprécié l’aspect concret de ce long travail mandaté par un organisme et porté sur sa réalité, ses questionnements et ses besoins. Malgré toutes les difficultés rencontrées et la charge de travail gigantesque, je conseille aux étudiant.es de se lancer dans ce projet riche en apprentissage ! Je pense que ce qui m’a le plus aidée, c’est d’oser demander de l’aide aux coordinatrices, faire appel à l’expertise d’autres enseignant.es et discuter le plus possible du projet dans l’entourage proche et avec des personnes qui ne sont pas du domaine. Il me semble que cette sollicitation permet non seulement de débloquer (parfois pour un très court laps de temps !), d’être rassuré.e et de se sentir moins seul.e, mais elle est aussi nécessaire dans la mesure où les connaissances et expertises des autres enrichissent notre réflexion et la qualité de notre travail. »

 

Emma Sauvestre, Relation entre les services offerts par le Centre de Prévention du Suicide de Québec (CPSQ) et les besoins des immigrants et des Canadiens anglophones résidant à Québec : regards croisés d'intervenants d’organismes communautaires et du CPSQ

« J’ai pris le cours de Laboratoire de recherche I par erreur, pensant que c’était un cours obligatoire. J’ai finalement décidé de rester et je ne regrette pas ce choix. J’ai eu la sensation, après ces 8 mois de recherche, d’avoir appris à connaître et à réajuster ma méthode de travail, à travailler en équipe, à mener des entrevues, entre autres. C’est une formation express mais utile aussi bien pour le parcours universitaire que personnel. Alors bien sûr, ce cours est très difficile. Il faut être conscient de ce que ce cours représente : peu de sommeil, plusieurs heures de travail par jour sur le projet, l’envie d’abandonner, le doute et la remise en question permanente. Ça peut faire peur, mais c’est normal de passer par là. Et quand on partage tout cela aux côtés de personnes qui vivent la même chose, on tient le coup et on est tellement fier.ères une fois que c’est fini. Le sentiment après la remise du projet final est indescriptible. Mon conseil ce serait donc de choisir un.e ou des coéquipier.ère.s en qui vous avez vraiment confiance, avec qui vous pourrez passer des heures au téléphone, avec qui vous pourrez discuter de vos défis et de vos peurs, mais aussi avec qui vous pourrez rire tout au long de cette expérience, partager de bons moments et sourire une fois votre projet accompli ! »

Comme le font ressortir ces témoignages, le Laboratoire de recherche est une expérience intense, riche en apprentissage et en émotion. Elle comporte également une part non négligeable de difficultésJe rapporte ici les propos d’étudiants qui ont spontanément offert des suggestions d’amélioration du cours. Parmi les difficultés, celle qui revient le plus concerne l’effet sur leur santé mentale de la combinaison entre le rythme du Laboratoire, les exigences du reste des cours, voire l’occupation d’un emploi. Le Laboratoire exige une forte charge de travail, puisqu’il pose le défi de produire un rapport de recherche d’une centaine de page de qualité académique en huit mois. Certain.es ont suggéré d’augmenter le nombre de crédit par session de ce cours. Par ailleurs, c’est également la première expérience d’enquête de terrain et de rédaction d’un rapport de recherche de la majeure partie des étudiant.es. Plusieurs insistent sur l'importance et la nécessité d'échanges plus réguliers avec l’enseignant.e, notamment avec des cours qui pourraient être plus fréquents, et avoir un contenu plus diversifié. De la sorte, le laboratoire intègrerait, idéalement, une alternance entre théorie et pratique, afin que chaque étape soit abordées collectivement et sous la supervision directe de l’enseignant.e et des coordinateur.rices. Cela ouvrirait plus d’espace aux échanges sur les expériences, les questionnements concrets, les blocages (principalement suivis par les coordinatrices, de manière individuelle et non collective). Loin de vouloir supprimer ce cours, qui est vécu comme une expérience d’apprentissage unique et professionnalisante, les étudiant.es aimeraient plutôt qu’il soit amélioré.

 

*Nicolas Fournier-Boisvert n’a pas continué à la deuxième session, le rapport a été rédigé par Gabriel Demers-Hamel.